Répression, jugement sur accord et voies de recours, quelles sanctions ?

Amende administrative - sanction pénale (loi 2004 et Code pénal) - jugement sur accord

La lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB/FT) impose aux professionnels assujettis de se conformer à une réglementation stricte et aux sources multiples.

Tel que cela est exposé dans la section relative aux obligations professionnelles (lire plus ici), le professionnel se voit dans l’obligation de mettre en place un mécanisme de vigilance fiable, permanent et efficace fondé sur une évaluation des risques.

En cas de défaillance, le professionnel peut donc se voir sanctionner pour manquement aux obligations applicables en matière de LCB/FT.  Rappelons que le risque est également pénal.

En effet, le professionnel encourt trois types de sanctions comprenant :

  • Les comportements négligents en matière de LCB/FT, qui seront punis par une amende administrative;
  • Les sanctions au titre de manquements à la loi de 2004 relative à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, telle que modifiée (la Loi) cela concerne entre autres l’obligation de vigilance, de coopération…;
  • Les infractions de blanchiment punis au titre de l’article 506-1 du Code pénal.

I. Sanctions administratives

La Loi prévoit que les autorités de contrôle et d’autorégulation (i.e. les organismes chargés de la surveillance d’un secteur d’activité spécifique) sont investies d’un pouvoir de sanction.

Les sanctions en question peuvent s’appliquer aux professionnels, mais aussi aux membres de leurs organes de direction, leurs dirigeants effectifs ou des autres personnes responsables par le professionnel du non-respect de ces obligations.

Des amendes d’ordre pouvant s’élever à 250.000 euros peuvent être prononcées notamment lorsqu’il y a un défaut de coopération de la part du professionnel visé.

Des amendes pouvant s’élever à 1.000.000 d’euros (voire 5.000.000 d’euros s’agissant des établissements de crédits) sont également applicables en cas de manquement :

  • à l’obligation d’effectuer une évaluation des risques;
  • aux obligations de vigilance à l’égard de la clientèle;
  • à l’obligation d’organisation interne adéquate.

De plus des avertissements, des blâmes et des interdictions d’exercer peuvent également être prononcés

Précisons également qu’en vertu de l’article 5-1 de la Loi, les autorités de contrôle et les organismes d’autorégulation sont tenues d’informer sans délai la cellule de renseignement financier (CRF) lorsque dans le cadre de leur mission de surveillance elles soupçonnent des infractions en matière de LCB/FT.

Les sanctions administratives décrites ci-dessus peuvent faire l’objet d’un recours, selon les circonstances devant les instances disciplinaires de l’ordre professionnel concerné lorsque applicable ou devant les juridictions administratives.

II. Sanctions pénales

A. Condamnations liées aux obligations de vigilance, organisation et coopération visées par la loi

Tel que cela est indiqué ci-dessus, les professionnels ayant commis des manquements quant à leurs obligations en matière de LCB/FT sont passibles de sanctions administratives, mais ils risquent également de faire l’objet d’une condamnation pénale.

En effet, L’article 9 de la Loi prévoit une amende pénale allant de 12.500 euros à 5.000.000 d’euros pour ceux qui ont contrevenu sciemment notamment aux dispositions relatives :

  • à l’obligation d’effectuer une évaluation des risques;
  • aux obligations de vigilance à l’égard de la clientèle;
  • à l’obligation d’organisation interne adéquate.

Il importe de rappeler que les infractions en question pourront selon les cas être imputable aux personnes morales, aux dirigeants mais aussi aux employés astreints à des obligations en matière de LCB/FT.

En pratique, sur base des informations transmises par la CRF, le Procureur d’Etat peut en effet poursuivre pénalement les différentes infractions constatées.

B. Condamnations liées à l’infraction de blanchiment visée par le Code pénal

Lorsque le comportement visé est susceptible de constituer une infraction de blanchiment, les articles 506-1 et suivants du Code pénal s’appliquent.

Il est rappelé que peuvent être poursuivis sur cette base, les auteurs de l’infraction de blanchiment mais également ceux qui auront facilités la commission de cette infraction ou en auront retiré un avantage quelconque.

En d’autres termes, tel que cela est décrit dans la section relative à cette infraction, les professionnels qui auront facilité une opération de blanchiment pourront être sanctionnés à ce titre (lire plus ici).

L’article 506-1 du Code pénal prévoit une peine d’emprisonnement de 1 à 5 ans et une amende de 1.250 euros à 1.250.000 euros ou de l’une de ces peines seulement.

La peine applicable est élevée à emprisonnement de 15 à 20 ans et d’une amende de 1.250 euros à 1.250.000 euros ou de l’une de ces peines seulement, si elles constituent des actes de participation à l’activité principale ou accessoire d’une association ou organisation.

Par ailleurs, s’agissant des personnes morales le taux maximum de l’amende applicable aux personnes morales est égal au double de celui prévu à l’égard des personnes physiques par la loi qui réprime l’infraction (ce taux est quintuplé en matière de financement du terrorisme).

En plus des condamnations susvisées, les peines complémentaires peuvent s’appliquer :

  • La confiscation

L’article 36 du Code pénal prévoit également qu’en matière de LCB/FT, l’auteur de l’infraction de blanchiment pourra :

      • se voir confisquer les biens objets du blanchiment (biens immobiliers ou mobiliers);
      • se voir confisquer les revenus provenant du blanchiment.

Il est précisé que ces confiscations viennent en supplément des amendes pouvant être prononcées. Par ailleurs, même en cas d’acquittement la confiscation peut venir s’appliquer (ex. dans l’hypothèse où le détenteur était de bonne foi quant à l’origine frauduleuse d’un bien issu d’une opération de blanchiment, la confiscation pourra néanmoins être prononcée).

  • les interdictions professionnelles

Lorsque l’auteur de l’infraction a sciemment utilisé les facilités que lui procure l’exercice d’une activité de nature professionnelle ou sociale, le tribunal peut prononcer pendant une durée de cinq ans au plus, de se livrer à cette activité sous quelques formes et selon quelques modalités que ce soit.

C. Aspects procéduraux : quid d’un jugement sur accord ?

Les sanctions pénales sont prononcées par les tribunaux. Cependant, le professionnel qui se montre coopératif pourrait envisager avec intérêt la possibilité de conclure avec les autorités de poursuite un jugement sur accord. 

L’introduction de cette procédure s’est faite par une loi du 2 février 2015, qui n’est pas sans rappeler les formes de justice pénale négociée/transactionnelle tel le « plaider coupable ».

Le jugement sur accord constitue une procédure simple et rapide. Elle permet à une personne qui a commis une infraction et qui reconnaît les faits de convenir avec le Parquet de la peine applicable moyennant un accord qui sera ensuite validé par le juge.

Le jugement sur accord est possible pour des crimes et délits punis soit d’un emprisonnement égal ou inférieur à cinq ans, soit d’une amende correctionnelle.

Cette procédure est donc possible lorsque les poursuites sont basées sur des violations (reconnues) de la Loi et également en matière de blanchiment (à condition de ne pas être en présence de la circonstance aggravante de participation à l’activité principale ou accessoire d’une association ou organisation criminelle). En pratique, cette procédure convient particulièrement bien aux manquements aux obligations de vigilance.

Celui-ci peut être conclu à tout stade de la procédure tant qu’un jugement n’est pas intervenu.

Il peut être conclu soit à l’initiative du Procureur d’Etat soit de la personne poursuivie elle-même (chacune des parties restant libre d’accepter ou de refuser à la fois son principe mais aussi, le cas échéant ses modalités).

L’accord est conclu par un acte écrit qui est signé par le Procureur d’Etat et la personne poursuivie.

Précision étant faite que l’assistance d’un avocat est indispensable pour ce type de procédure.

L’accord doit ensuite être homologué par une chambre correctionnelle.

Les voies de recours ordinaires sont applicables. Toutes les parties au jugement d’accord peuvent dès lors relever appel de la décision rendue par la chambre correctionnelle.

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